Minerve éclairant les Sciences et les Arts
Tableau, 18e siècle (4ème quart) / 19e siècle (1er quart)
Auteur : Pierre-Paul PRUD’HON, (Cluny, 1758 – Paris, 1823). École Française
Peinture à l’huile sur papier marouflé sur toile. Hauteur : 14 cm ; Largeur : 18,3 cm. Inv. 1984-18-P
Après sa formation à l’École de dessin de Dijon, sous l’égide du peintre François Devosge (1732-1811), Pierre-Paul Prud’hon remporte en 1784 le Prix de Rome délivré depuis 1776 par les États de Bourgogne. A Rome (1784-1788), passionné d’antique, lecteur de Johann Joachim Winckelmann (1717-1768), admirateur de Léonard de Vinci pour l’expression, il regarde les contemporains (Mengs) et se lie d’amitié avec Canova. C’est à contrecoeur qu’il copiera, au palais Barberini, le très baroque plafond de Pietro da Cortona (1596-1669), dont il donne une magistrale interprétation néo-classique (musée de Dijon, salle des Statues). Délaissant le répertoire historico-mythologique traditionnel, son oeuvre est essentiellement consacrée à l’allégorie, peinture d’idées et de sentiments dont il renouvelle le langage. Son métier est à la fois sensible et sensuel – on l’a surnommé très tôt « le Corrège français » pour son art du clair-obscur, en un temps qui privilégie la ligne – et puissant, comme l’attestent la vigueur de son trait même dans les dessins les plus gracieux (mais aux antipodes d’un Boucher) ou les contrastes lumineux dramatiques qui en font un des initiateurs du Romantisme. Longtemps célèbre pour ses dessins d’illustrations (Daphnis et Chloé ; La Mort de Virginie, Le Premier baiser de l’Amour), il connaît la consécration sous l’Empire (La Justice et la Vengeance divine poursuivant le Crime, 1808, Louvre), exécute le portrait de Joséphine (1805-1809, Louvre) et celui du Roi de Rome (1811, Louvre), devient professeur de dessin de Marie-Louise et conçoit le décor des fêtes du mariage de 1810, les meubles et le berceau offerts à l’impératrice par la Ville de Paris en 1810 et 1811. Son influence sur le XIXe siècle sera décisive, comme en témoigne l’admiration que lui porta Delacroix. (Notice de Sylvain Laveissière, 2015)
Une note d’Eudoxe Mareille, relevée par Guiffrey, donne cette composition comme « destinée à orner une des salles du palais du corps législatif « , c’est-à-dire le Luxembourg. Aucun témoignage n’a été découvert permettant de confirmer ou non cette destination. Outre une série de trois dessins, on connaît deux peintures dérivant de cette esquisse, toutes deux ébauchées et inachevées, au Louvre (RF 208) et au musée de Dijon (Inv. 1988-9-P), ainsi qu’une gravure inversant le sujet par Mlle A. Bleuze dans le style de Copia. Cette vignette, qui ressemble aux têtes de lettres administratives comme Prud’hon en dessina plusieurs, porte le titre : « Minerve alimentant les Sciences et les Arts », qui se comprend par le geste de la déesse de la Raison, laquelle, accompagnée de sa chouette, alimente une lampe en y versant de l’huile pour éclairer les travaux de trois petits génies. Si le sens de l’allégorie est simple (le travail intellectuel ou artistique doit être éclairé, guidé par la raison), son application demeure hypothétique. Les tâches du corps législatif sont d’un autre ordre, politique : on comprendrait mieux une image destinée à l’Institut, dont Prud’hon est nommé membre non résidant en 1796, puis correspondant le 28 janvier 1803. L’animal (invisible dans l’esquisse, mais distinct dans la gravure) au bec duquel est suspendue la lampe à huile semble être un Phénix, l’oiseau qui renaît de ses cendres : est-ce une allusion à l’Académie royale, supprimée en 1793, qui renaît en 1795 dans l’Institut national ? (Notice de Sylvain Laveissière extraite de » Prud’hon ou le rêve du bonheur « , Paris, New York, 1997-98)
Historique : Collection M. de Montigny ; Collection Edmond Borthon ; 1890, Dijon, Vente Borthon ; 1960, Paris, vente à Galerie Charpentier, 24 juin
Acquis avec le concours de la Société des Amis du Musée de Dijon, de l’État et du Conseil Régional de Bourgogne (F.R.A.M.), 1984
© photo Michel Bourquin