au nom de l’ébéniste « J. Demoulin », fer, XVIIIème siècle. Don de la Société des Amis des Musées de Dijon, avec le concours du F.R.A.M. en 2005. © musée des Beaux-Arts de Dijon/François Jay.
Fer : Hauteur : 5 cm ; Largeur : 11 cm ; Profondeur du manche : 1 cm.
Estampille « J. DEMOULIN »
Jean Demoulin, ébéniste d’origine bourguignonne, est né à Selongey (Côte d’Or) le 13 août 1715. Fils d’un vigneron, on ignore tout de son enfance et de sa jeunesse ; sans doute formé par un menuisier du pays, il a dû faire son apprentissage à Dijon.
Il s’établit à Paris vers 1745, où on le trouve installé comme ébéniste rue du Faubourg Saint-Antoine (son estampille J. DEMOULIN JME rappelle qu’il fait partie de la corporation des menuisiers ébénistes parisiens, elle sera d’ailleurs utilisée ensuite par ses fils).
Le 8 février 1755 Jean Demoulin accède à la maîtrise.
De son activité parisienne nous connaissons quelques belles pièces dont la superbe commode Louis XV, décorée en laque dans le style chinois, commandée par le Duc de Choiseul pour son château de Chanteloup en Touraine (actuellement au Musée de Tours).
D’autres pièces connues de ce style Louis XV et à décor de laque (commodes, encoignures) de très grande qualité et dont l’exécution nécessite le concours de très habiles vernisseurs et bronziers, ainsi que des meubles de style Transition en marqueterie (commode du Musée Denon de Chalon-sur-Saône), témoignent des compétences techniques et artistiques de cet ébéniste, dont le travail est apprécié par une riche clientèle.
Dans les années 1758-1759, Jean Demoulin quitte Paris pour s’installer à Dole dans le Jura.
En 1779, il retourne en Bourgogne, vraisemblablement sur l’invitation du Prince de Condé, Gouverneur de la Province de Bourgogne, qui l’a sans doute connu et apprécié à Paris et qui désire l’attacher à son service.
Le 29 janvier 1780, Jean Demoulin obtient à Dijon de nouvelles lettres de maîtrise.
Il s’installe avec ses deux fils Jean-Baptiste (Paris, 1750 – Dijon, 1837) et Bertrand (Paris, 1755 – Dijon, 1853) qui obtinrent leurs lettres de maîtrise à Dijon, ainsi que le brevet d’ébéniste du Prince de Condé. Leur magasin, rue « Derrière Saint-Nicolas » (actuelle rue Vannerie), puis rue Condé (actuelle rue de la Liberté), connu par les étiquettes commerciales publicitaires retrouvées sur leur production, atteste de leur savoir-faire et de leur création riche et variée particulièrement appréciée par la noblesse et les riches parlementaires de Dijon et de toute la Bourgogne.
En 1788, Jean Demoulin se retire des affaires et laisse ses deux fils à la tête d’une entreprise florissante qui sut survivre à la Révolution. Jean Demoulin décède à Dijon le 14 messidor an VI (2 juillet 1798), à l’âge de 83 ans.
Ces deux fers « J. DEMOULIN » (inv. 2005-7-1) et « JME » (inv. 2005-7-2) correspondent à l’estampille qu’a laissée sur ses meubles l’ébéniste Jean Demoulin lors de toute sa carrière, pendant sa période parisienne, ce qui est normal, mais également lors de sa période provinciale (Dole et Dijon). Ils correspondent bien à l’estampille qui frappe tous ses meubles ; ces derniers, pour la plupart, portent également une étiquette publicitaire ; on retrouve ces deux éléments (estampille et étiquette) sur les meubles réalisés à Dijon par ses deux fils Jean-Baptiste et Bertrand.
Il est curieux de constater que ces fers soient restés dans les mains de Jean Demoulin, après avoir quitté Paris. En effet, le poinçon JME était frappé sur les meubles parisiens par les membres délégués de la corporation des ébénistes parisiens et devait se trouver alors en leur seule possession. Il représentait effectivement un moyen de contrôle fiscal de la production des ébénistes parisiens appartenant à cette corporation.
La deuxième curiosité réside dans le fait que les deux fils de Jean Demoulin aient continué à utiliser cette estampille JME, alors qu’ils n’y avaient pas droit, n’ayant pas eu accès à la maîtrise parisienne. On peut supposer que ce poinçon, témoignage de l’activité parisienne paternelle, représentait un label de qualité et servait ainsi à valoriser leur production.
L’entrée de ces deux poinçons dans les collections a été capitale pour le Musée des Beaux-Arts de Dijon qui possède des meubles d’époque Louis XV, Louis XVI, (commode, coffret écritoire, secrétaire) de Jean Demoulin et de ses fils.
Il est extrêmement rare de pouvoir réunir les deux fers pour les raisons citées plus haut (artiste et jurande) et encore plus rare de pouvoir récupérer ce type d’objet peu courant dans les collections publiques et sur le marché de l’art, provenant directement de la famille d’un artiste du XVIIIe siècle, toujours établie en Bourgogne.
Le don de la Société des Amis des Musées de Dijon a permis de compléter une documentation précieuse sur un des menuisiers ébénistes les plus remarqués de province. (d’après une notice de Catherine Gras, 2005)
Oeuvres en lien : 2005-7-2 Fer à estampiller avec le poinçon de jurande « JME »
Historique : Collection descendants de Demoulin.